Bernard THOMAS-ROUDEIX - Philippe RILLON, Oeuvres anciennes

Bernard THOMAS-ROUDEIX est peintre et céramiste. Depuis les années 60, et l' Ecole des Beaux Arts, son parcours artistique croise celui de Philippe RILLON peintre lui aussi, et désormais directeur artistique de la galerie. Ces deux là partagent donc une complicité de longue date. Aussi allait il de soi de leur donner carte blanche pour interroger chacun dans le développement de son œuvre, ses permanences et ses variations. L'exposition concentrera pourtant son propos sur les quinze dernières années avec un accrochage qui soulignera l'effet de contraste entre les deux artistes comme entre les périodes de chacun.

 

 

Bernard THOMAS-ROUDEIX       

est incontestablement et depuis l'origine un «figuratif» à tendance expressioniste, un peintre qui ne se détourne jamais complètement de la figure et de l'observation du motif. Ainsi, ses «paysages» et particulièrement ses aquarelles, reconstruisent et concilient perception, sensation et souvenir d'un motif observé. Mais on peut tout aussi bien le considérer comme un «dé-figuratif» . Avec la volonté farouche de marcher hors les sentiers battus, il éclate le motif en de multiples modes de perception  du passé-présent, proche-lointain, imaginaire et réel... Ces antagonismes bousculent et explosent les certitudes. Car cet homme affable est aussi un esprit à l'humour caustique, toujours en éveil, et disposé  à « marier les contraires », un peintre venu à la céramique, mais toujours disponible à d'autres aventures, comme l'illustration, la caricature ou le dessin humoristique.

Singulièrement et joyeusement anarchiste, il revendique pourtant ses maîtres, d'abord, la Renaissance italienne et les primitifs flamands, ensuite, CoBrA, Dubuffet et l'Art Brut lorsque dans les années 70/80 tout semble encore possible, puis, Tapiès pour le plus de réalité qu'apporte au tableau l'incorporation de la « matière » brute, et enfin, Francis Bacon, quand, dans les années 80, l'humour et le sentiment enivrant d'invention permanente de la liberté font place à une perception plus dramatique du monde. De longues pauses de réflexion succèdent à l'ivresse de la spontanéité ; apparaît alors la céramique qui met la matière picturale en autre perspective Bernard Thomas-Roudeix insiste: il n'est pas sculpteur, mais peintre et céramiste. Pour lui, "Je" est toujours ailleurs.

Bernard Thomas-Roudeix , Histoire fumante, céramique, 45x22x17cm

 Philippe RILLONa construit son œuvre en de multiples périodes et ruptures qui toutes naviguent en territoire onirique. Il revendique cet « entre-deux de tous les contraires ou l'imaginaire concilie fort bien ombre et lumière, apparition et disparition, l'équilibre et la chute, la vie et la mort, comme le haut et le bas d'un éternel présent. A équidistance du naturalisme et du formalisme, il aime fabriquer des mystères et donner à supposer que l'essentiel reste caché». Il y eut l'influence du surréalisme (au tout début surtout). Puis, loin de toute tentation narrative, la curiosité pour toute la peinture du vingtième siècle, de Kandinsky à l'informel.

                                     Philippe Rillon, dessin, 50x32,5cm, 1984                                                      Masque reliquaire Noir, technique mixte, 65x50cm, 2002.,                        

Philippe RILLON, connaît son métier et construit le tableau en architecte. Pourtant cette construction, aussi évidente et solide soit-elle, suggère paradoxalement un mystère qui sourd, exsude, transpire des matière vives, textures, trames, tissus, «architextures» (depuis 2005), d'abord dessinées (années 80), puis progressivement, réalisées par l'intégration de matières étrangères à la peinture, jusqu'à l'apparition d'authentiques tressages-tissages et autres (mauvais) traitements infligés à la toile cousue. Devant les tableaux réalisés depuis le début du siècle on songe au fantôme de l'Afrique et aux puissances magiques de tous ces témoins d'un temps révolu où l'art n'avait pas besoin d'être nommé. Et Philippe RILLON de conclure sur sa volonté de «laisser des traces pour se donner au moins l'illusion d'un commerce durable avec l'éternité»

Beaux restes, huile sur toile, 33x24cm 2005